La supraconductivité est un phénomène physique par lequel la résistance électrique d'un matériau chute à zéro à une température critique donnée. La théorie de Bardeen-Cooper-Schrieffer (BCS) constitue une explication pertinente, décrivant la supraconductivité de la plupart des matériaux. Elle souligne que les paires d'électrons de Cooper se forment dans le réseau cristallin à une température suffisamment basse et que la supraconductivité BCS provient de leur condensation. Bien que le graphène soit lui-même un excellent conducteur électrique, il ne présente pas de supraconductivité BCS en raison de la suppression de l'interaction électron-phonon. C'est pourquoi la plupart des « bons » conducteurs (comme l'or et le cuivre) sont de « mauvais » supraconducteurs.
Des chercheurs du Centre de physique théorique des systèmes complexes (PCS) de l'Institut des sciences fondamentales (IBS, Corée du Sud) ont découvert un nouveau mécanisme alternatif permettant d'obtenir la supraconductivité du graphène. Ils ont réalisé cet exploit en proposant un système hybride composé de graphène et de condensat de Bose-Einstein bidimensionnel (BEC). Leur recherche a été publiée dans la revue 2D Materials.

Système hybride constitué d'un gaz d'électrons (couche supérieure) dans le graphène, séparé du condensat bidimensionnel de Bose-Einstein, représenté par des excitons indirects (couches bleue et rouge). Les électrons et les excitons du graphène sont couplés par la force de Coulomb.

(a) Dépendance à la température du gap supraconducteur dans le processus médié par le bogolon avec correction de température (ligne pointillée) et sans correction de température (ligne continue). (b) Température critique de transition supraconductrice en fonction de la densité du condensat pour les interactions médiées par le bogolon avec (ligne pointillée rouge) et sans (ligne continue noire) correction de température. La ligne pointillée bleue indique la température de transition BKT en fonction de la densité du condensat.
Outre la supraconductivité, le BEC est un autre phénomène qui se produit à basse température. Il s'agit du cinquième état de la matière prédit par Einstein en 1924. La formation du BEC se produit lorsque des atomes de basse énergie se rassemblent et entrent dans le même état d'énergie, un domaine de recherche approfondi en physique de la matière condensée. Le système hybride Bose-Fermi représente essentiellement l'interaction d'une couche d'électrons avec une couche de bosons, tels que les excitons indirects, les excitons-polarons, etc. L'interaction entre les particules de Bose et de Fermi a donné naissance à une variété de phénomènes nouveaux et fascinants, qui ont suscité l'intérêt des deux parties. Vision fondamentale et pratique.
Dans ces travaux, les chercheurs ont mis en évidence un nouveau mécanisme supraconducteur dans le graphène, dû à l'interaction entre les électrons et les « bogolons » plutôt qu'avec les phonons dans un système BCS classique. Les bogolons, ou quasiparticules de Bogoliubov, sont des excitations dans le BEC, qui présentent certaines caractéristiques particulaires. Dans certaines plages de paramètres, ce mécanisme permet à la température critique supraconductrice du graphène d'atteindre jusqu'à 70 K. Les chercheurs ont également développé une nouvelle théorie BCS microscopique axée spécifiquement sur les systèmes basés sur un nouveau graphène hybride. Le modèle qu'ils ont proposé prédit également que les propriétés supraconductrices peuvent augmenter avec la température, ce qui entraîne une dépendance non monotone de la bande supraconductrice à la température.
De plus, des études ont montré que la dispersion de Dirac du graphène est préservée dans ce schéma médié par le bogolon. Cela indique que ce mécanisme supraconducteur implique des électrons à dispersion relativiste, phénomène peu étudié en physique de la matière condensée.
Ces travaux révèlent une nouvelle voie pour obtenir une supraconductivité à haute température. Parallèlement, en contrôlant les propriétés du condensat, nous pouvons ajuster la supraconductivité du graphène. Cela ouvre une nouvelle voie pour contrôler les dispositifs supraconducteurs du futur.
Date de publication : 16 juillet 2021